• La famille : crise ou mutation?

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     La famille, entre ses modifications et ses recompositions intéresse et inquiète quelquefois les spécialistes, sociologues comme psychologues. Sur ce sujet, les deux professions se complètent souvent, s'opposent parfois.

    La famille est considérée comme le « domaine de la vie le plus important » pour les européens d'après une enquête de l'INSEE menée en 2003 sur l'ensemble des pays de l'UE. Rien d'étonnant à cela, puisque la famille est ce qui nous touche de plus près, de notre naissance à notre mort. Lieu de socialisation, lieu de construction identitaire et d'individualisation, la famille constitue le point d'ancrage et de repères le plus important dans l'édification de l'individu.

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    C'est pourquoi les modifications et les bouleversements qui la touchent inquiètent à plus d'un titre. Mais qu'en est-il exactement ? Les questions actuelles tournent essentiellement autour de la parentalité et des liens éducatifs.

    D'ailleurs, d'un point de vue sociologique et historique, il est intéressant de relever qu'à chaque fois que l'Etat a voulu intervenir dans la famille, il l'a fait par le biais de l'enfant et de son bien-être. Or, les débats actuels portent justement sur la dimension éducative dans la relation parent/enfants.
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    Critiquée par les uns, encensé par les autres, elle semble porter à elle seule le poids des transformations sociales et des comportements qu'a subi la France depuis ces dernières années. L'épisode récent des banlieues en atteste.

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    • L'exemple des phénomènes de « violences urbaines » de novembre 2005

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    Quelques raisons invoquées :

    → polygamie des pères

    → relâchement parental

    → perte de l'autorité familiale

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    En filigrane, c'est souvent la place et le rôle de l'autorité paternelle qui est questionnée. Depuis que l'autorité est partagée entre les parents, les enfants ne seraient plus aussi bien élevés, entend-on parfois (discours réactionnaires et il faut bien le dire souvent aux accents « pétainistes »)

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    Comme si les problèmes de délinquance juvénile, les actes de violence scolaire et extrascolaire trouvaient leurs sources et leurs explications au sein de la structure familiale seulement (on y reviendra plus tard, cf. cours 4). Si le problème part de la famille, c'est donc à la famille qu'il faut s'en prendre et c'est à elle qu'on va s'attaquer. Vision assez réductrice, voire simpliste qui vise à caricaturer la réalité et passer à côté des véritables problèmes.

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    Accuser la famille, c'est directement la rendre responsable des réussites et des échecs de ses enfants. Certes, la famille porte certainement une part de responsabilité, mais une part seulement. Accuser la polygamie (interdite en France normalement, donc qui ne devrait pas exister), ou le relâchement parental, c'est individualiser la responsabilité, en oubliant – sciemment ? – le poids des situations économiques, sociales, culturelles, qui pèsent sur certaines familles et leurs modes de vie souvent liés à la précarité. En individualisant le problème, on évite de porter le regard sur les transformations de la structure sociale et le poids de la collectivité. On élude l'essentiel en se concentrant sur un aspect seulement du problème. Mais l'on retrouve le même mode de fonctionnement pour expliquer le chômage, la pauvreté, l'exclusion sociale, on individualise (stigmatise ?) et l'on refuse d'augmenter la focale.

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    Or ces situations culturelles, sociales et économiques ne relèvent pas exclusivement des responsabilités familiales mais bien des responsabilités collectives, notamment celles de l'Etat.

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    Que nous dit cet exemple ?

    Que la famille n'est pas coupée du reste de la société. Qu'elle n'est pas plus fautive, ni moins responsable de ce qui s'y joue. La famille est une institution qui évolue avec la société. A trop regarder du côté de la famille, on en oublie qu'elle n'est qu'une branche de l'arbre. Si sa responsabilité est engagée, il faut aussi accepter que la responsabilité collective soit elle aussi engagée, de prime abord (on y reviendra dans notre premier chapitre).

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    On parle aujourd'hui de la famille comme d'une institution en crise, en perte de repères, de valeurs. La famille aurait perdue son âme d'antan. Mais parler de crise de la famille revient à dire qu'il y aurait eu un âge d'or de la famille, une « époque formidable », constitué d'un modèle idéal et unique de famille où, pour reprendre un aphorisme panglossien : « tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. » 

    On verra que la réalité historique et sociale nous dresse un portrait beaucoup moins angélique, bien moins éthéré, que ce que certains discours moralisateurs, idéologiques ou alarmistes ne le laissent entendre. Car si la famille d'autrefois pouvait paraître plus sécurisante, elle était aussi beaucoup plus inégalitaire et plus subie qu'elle ne l'est aujourd'hui (ce qu'on va voir dans le cours 1).

    C'est l'éternel débat entre liberté et sécurité. Supprimez des libertés, vous gagnez en sécurité. Otez de la sécurité, vous gagnez en liberté. La famille d'aujourd'hui a gagné en liberté et en démocratie (dans ses rapports parents/enfants, père/mère, séparation/union) ce qu'elle a perdu en sécurité, c'est-à-dire en aptitude intégrative. La famille contemporaine est, pour prendre un terme à la mode, affectivement plus précaire. Non pas que l'affectif soit moins influent. Bien au contraire, c'est l'excès d'affectif qui entretient la précarité conjugale : à la moindre défaillance, le couple éclate (Cf. cours 2 sur le lien conjugal).

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    Mais c'est oublier aussi le rôle majeur qu'a joué l'école dans cette transformation des fonctions familiales. Si autrefois la famille était souvent le lieu où les individus apprenaient des savoir-faire, aptes à les intégrer à la sphère professionnelle, c'est maintenant l'école qui dispense en grande partie cette fonction intégrative. C'est par la scolarité et le diplôme que l'individu va s'intégrer socialement, professionnellement dans la société. C'est l'école qui fournit le plus sûrement une place et une position dans la hiérarchie sociale. Certes, le milieu familial conserve son importance, mais il n'est plus premier. Le chômage des jeunes en atteste. Ce n'est plus la situation familiale qui conduit à l'obtention d'un métier ou non, mais bien la situation scolaire, au travers du diplôme.

    Avec l'accession pour tous à l'enseignement secondaire et supérieur dans les années 60, l'école est devenu le véritable moteur de l'intégration sociale et professionnelle. La généralisation de l'accès à tous et à toutes a également permis à la famille de se repositionner et de redéfinir ses rôles.

    La crise économique du début des années 80 va, à son tour, également contribuer à modifier les comportements familiaux. On va voir augmenter le nombre de jeunes vivant au domicile parental par exemple, reportant une vie conjugale à plus tard, ou l'expérience de la cohabitation se développer, les familles monoparentales sombrer dans la précarité, etc. (Cf. cours 3).
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    La famille n'est donc pas un îlot protégé et inaltérable, contrairement à ce que certains souhaiteraient, mais s'accommode des évolutions sociales, culturelles, économiques et recompose en permanence avec. Redéfinition de ses fonctions, redistributions de ses rôles : la famille évolue et se transforme avec la société. Plus individualiste, mais aussi plus conflictuelle par certains de ses aspects, elle doit sans cesse réopérer à des repositionnements, des redistributions des rôles. L'égalitarisme familial, engendre frustrations et remise en questions du rôle et de la place de certains pères, le refus de se voir dicter ses comportements de la part des enfants, la volonté de ne pas avoir à multiplier les temps de travail pour la femme, partagée entre activité professionnelle et activité domestique, etc. La précarité économique et sociale engendre des peurs et des incertitudes, aptes à favoriser la création de conflits. Le soutien intergénérationnel des parents et grands-parents envers leurs petits enfants en proie au chômage, aux difficultés d'insertion professionnelle et économique, sont aussi des vecteurs à prendre en compte dans l'analyse des transformations familiales. Le maintien au domicile parental plus tardif peut engendrer également des sources multiples et variées de conflits. Les recompositions de leurs côtés, sont autant de potentialités de conflits que la famille s'élargit (se dissout ?) sans pour autant que le droit n'accorde un rôle juridique au parent rapporté. Si les conflits paraissent plus fréquents, c'est aussi parce que les sources éventuelles sont en plus grand nombre : entre parents et beaux-parents, parents rapportés et enfants, frères et demi-frères, ancien conjoint et nouveau conjoint, etc. (cf. cours 4).

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    La famille ne fait pas que subir les transformations, elle invente des nouveaux cadres, de nouvelles pratiques. L'égalitarisme, l'individualisme, l'épanouissement personnel, le primat de l'affectif sont quelques unes des valeurs sur lesquelles repose la société contemporaine et dans lesquelles la famille puise de nouveaux moyens à sa socialisation.

     C'est pourquoi, plus que de crise, nous montrerons qu'il est préférable de parler de transformation, de mutation de la famille contemporaine, loin du cadre normatif dans lequel elle était, jusqu'à récemment encore, enfermée.

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  • Commentaires

    10
    Jennifer BOUVIER
    Mardi 3 Avril 2012 à 16:51
    Cours ?
    Bonjour, je révise actuellement pour un oral de concours et votre introduction m'a interpelée... Vous faites quelques références à des cours et j'aimerais beaucoup y avoir accès pour approfondir mes révisions, serait-ce possible ?
    9
    Odilon
    Vendredi 16 Avril 2010 à 20:52
    famille et mutations sociales.
    je suis en 1ère année de l'école supérieure des Assistants Sociaaux à la faculté des sciences de la santé de Cotonou. je sollicite votre aide pour le plan d'un exposé intitulé: Famille et mutations sociales. D'avance je vous remercie
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    8
    Dimanche 17 Janvier 2010 à 19:19
    Invitation
    Les éditions L'Originel vous invitent le vendredi 22 janvier à 19h à rencontrer à l'occasion de la sortie du livre "Crise et Mutation" Les auteurs : Charles Antoni, Directeur des éditions L’Originel, Jean-pierreCrépin, Auteur du Blog culte Nécronomie Au Café Restaurant Le Mignon, 8 rue Lamartine - 75009- PARIS - 01 48 74 31 20 (ligne 7 métro Cadet)
    7
    charlotte
    Jeudi 22 Janvier 2009 à 19:23
    introduction
    Il s'agit d'une introduction de qualité! la mutation des familles est un sujet qui m'intéresse tout particulièrement. Y a t il une suite? si c'est le cas, pourriez vous me la faire parevenir? Merci à l'avance.
    6
    nathalie
    Mardi 28 Octobre 2008 à 15:19
    famille
    bonjour, je suis tombée sur votre site en effectuant mé recherche pr un exposé que j'ai a faire en sociologie.Je suis en 1ere année de licence et je dois réaliser un exposé sur lé transformations de la famille, ma problèmatique est "la famille, une institution en crise?" mais je n'arrive pas a trouver mon plan... Pourriez-vous me donner quelques conseil?
    5
    Gorau
    Mardi 4 Décembre 2007 à 10:51
    merci
    Bonjour, Je suis actuellement en formation continue à la faculté de reims (51) pour préparer un diplome universiatire conseiller mission locale. Je suis conseillere dans un mission locale depuis 5 ans. Dans le cadre de ma formation, je dois faire un mémoire. J'ai choisi comme thème les effets du décrochage scolaire sur l'appartenace / l'identité. Je souhaitais juste vous dire que vos sujets m'ont énormément intéressée et éclairée. Encore merci pour le partage de votre savoir.
    4
    MAHIAOUI
    Lundi 3 Décembre 2007 à 21:53
    sujet
    Bonjour, J'enseigne pour la 1ere fois la sociologie à des BTS ESF et j'ai un cours sur la "socio de la famille" bientot sur 4heures. Pourriez vous me transmettre votre trame (si ovus en possédez une) pour que je puisse m'en inspirer. Ne vous inquiétez je respecte les copyright et les droits d'auteur...;) Merci Marina
    3
    julie
    Jeudi 25 Octobre 2007 à 14:48
    famille
    Votre texte m'intéresse car j'effectue un travail sur les enfants pauvres. J'aurais aimé savoir quels étaient vos références bibliographiques à ce sujet sur les interventions de l'Etat par le biais de l'enfant. Merci
    2
    Mardi 9 Octobre 2007 à 22:03
    Contributions
    Bonjour, J'ai découvert votre blog grâce à un lien sur Educ et il a retenu mon attention par sa pertinence et sa qualité. J'aimerais donc vous présenter mon site Esprits Libres, un magazine généraliste interactif, où vos contributions seraient bienvenues... Notre site est modeste malgré l'importance du défi qui consiste à donner la parole aux internautes citoyens, sans langue de bois pour défendre leurs engagements, leurs idées, leurs combats. Nous essayons de le faire connaître et de trouver des participants pour les échanges et le partage d'informations. Cela vous intéresserait-il? L'adresse: http://www.forumdesforums.com/ Au cas où cette suggestion ne vous intéresserait pas ou que le principe du site ne vous convaincrait pas, serait-il concevable d'utiliser vos contributions avec évidemment un respect complet des droits d'auteur? A savoir que vous pouvez publier vous-même et que l'article ne subira pas de censure ou de modération, il apparaît dès sa demande de publication. Nous nous efforçons de suivre chaque jour, pendant de nombreuses heures, l'évolution du site et nous sommes attentifs à toutes vos demandes et critiques. Nous avons la chance d'évoluer en petit comité ; des personnes sincères, qui ont appris à se connaître et qui se respectent même si elles sont très différentes ce qui évite les risques de trolls et de perturbations... Nous serions ravis de vous découvrir... Cordialement Fuchinran.
    1
    Mardi 9 Octobre 2007 à 15:11
    Famille
    pas mal le texte, en tout cas la famille c'es bien plus sacrée chez les américains et les arabes par rapport aux européens, sauf peut etre les italiens. C'est vrai que la famille est en perpetuelle évolution.
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