• Vous serez tous des maîtres[1]
    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p><o:p> </o:p>

    Dans cet ouvrage, l'auteur s'intéresse au fondement politique et philosophique de l'idée de liberté et d'égalité telle que les Modernes l'ont défendue. P. d'Iribarne revient sur la conception moderne de l'individu libre et émancipé, maître de lui-même, qui s'oppose à celle de l'homme enchaîné, vassalisé, esclave d'un maître, d'un Dieu, de coutumes, de traditions tutélaires, propre des sociétés aristocratiques anciennes.

    L'auteur s'intéresse plus particulièrement aux conceptions de la liberté et de l'égalité telles qu'elles furent formulées alors, dans leur contenu. Il revient sur quelques auteurs fondamentaux qui ont traité la question, notamment John Locke[2], précurseur et inspirateur de Jean-Jacques Rousseau sur lequel l'auteur s'appuie pour l'essentiel, ainsi que sur les textes de Sieyès sur le Tiers-Etat[3]. Désormais, « vous serez tous des rois » disait Rousseau.

    <o:p> </o:p>

    L'auteur va démontrer que derrière l'idéal de liberté et d'égalité revendiqué par tous ces auteurs, une contradiction demeure dans l'exercice de cette liberté, qui sera difficilement surmontée : à savoir le passage de l'individuel au collectif. Si tous les trois prônent l'abolition des privilèges qui contredisent toute idée de liberté et d'égalité entre les hommes, et consacrent les vertus de la démocratie, à condition qu'elle soit véritablement le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple, ils reconnaissent la nécessité de passer par des représentants du peuple pour établir des lois et des règles communes à tous, indépendamment de son statut social. Mais comment lier la volonté générale à la volonté individuelle sans nier la seconde, sans entraver la liberté de chacun ? La réponse qu'apporteront les Lumières à cette question est claire : c'est par la raison que l'homme devient libre : c'est donc la raison qui doit le libérer et lui dicter ses comportements, quitte pour cela à devoir le « forcer » à être libre !

    <o:p> </o:p>► Une soumission qui libère
    <o:p> </o:p>Ainsi, la volonté générale nous dit Rousseau est toujours la volonté raisonnable, car c'est celle de la majorité tandis que la volonté individuelle est arbitraire et subjective si elle ne suit pas la volonté générale. S'y opposer, c'est aller contre le sens de l'Histoire, c'est refuser de se libérer de ses chaînes par manque de savoir, par absence de sagesse, de raison. L'homme raisonnable, lui, sait où est son intérêt : la volonté générale est aussi sa volonté propre : il est pleinement libre. En revanche, s'il s'oppose à la volonté générale, il s'oppose sans le savoir à lui-même, à sa propre liberté. Il faut donc dans certains cas l'obliger à être libre (!) ; et c'est justement l'objectif de la volonté générale. « Comme la nature donne à chaque homme un pouvoir absolu sur tous ses membres, le pacte social, donne au corps politique un pouvoir absolu sur tous les siens. »

    On voit bien comment Rousseau dépasse difficilement la contradiction en la réduisant à celle de la raison émancipatrice, en affirmant la primauté du tout sur le particulier, au-delà de l'intérêt partisan qui est toujours pour lui, un intérêt égoïste et vil, et qui n'agit donc pas dans le sens de la liberté des hommes.

    <o:p> </o:p>

    Pour Rousseau, la volonté générale prime sur la volonté individuelle, celle du peuple sur celles de l'individu. L'homme doit s'y plier s'il veut être libre, car son intérêt à long terme est à ce prix, tandis que ses intérêts particuliers sont non raisonnables. Sa conception de la liberté est donc ambiguë puisqu'il fait du tout (la volonté générale) le lieu même de l'expression de la liberté des hommes, produit de la raison, au détriment de la liberté individuelle, produit de l'arbitraire arraisonné.

    Voici ce que nous dit Rousseau à ce sujet : « l'impulsion du seul appétit est esclavage ; l'obéissance à la loi qu'on s'est proscrite est liberté. Grâce à elle l'homme se voit forcé de conseiller sa raison avant d'écouter ses penchants. »

    Rousseau fait de la psychologie avant l'heure. En terme freudien, les penchants humains se rapportent à ce que le père de la psychanalyse nomme les motions pulsionnelles du moi, tandis que la loi à l'obéissance s'identifie à l'institution surmoïque.  D'un côté, un moi qui enchaînerait donc, arraisonné et esclave, de l'autre, un surmoi, c'est-à-dire une conscience morale, un « bien commun », qui libèrerait. Pourtant, Freud opérera au renversement complet de l'idée rousseauiste d'une volonté générale libératrice. 150 après Rousseau, il écrira que l'homme lutte en permanence contre la culture qui l'inhibe plus qu'elle ne le libère. Si le surmoi fait bien la loi, il la fait au détriment du moi, au détriment des satisfactions pulsionnelles. La liberté psychique pour Freud serait davantage dans un moi « désurmoïsé » en quelque sorte.

    <o:p> </o:p>

    Rousseau voit dans la pensée raisonnable le socle de la liberté des hommes, et dans le respect de la loi l'essence morale de cette liberté.  « A respecter la volonté générale nous dit Rousseau, et la loi qu'elle conduit à établir, plutôt que sa volonté particulière, on est fidèle à ce qui, en soi, se rapporte au bien, et c'est alors qu'on est libre. C'est en effet par la raison, dont la loi est l'expression, que l'on accède à la liberté. »

    <o:p> </o:p>

    Adam Smith réussira le tour de force qui consiste à réconcilier les deux dimensions, à savoir l'individuel et le collectif, la volonté partisane et le bien commun, avec sa théorie de la « main invisible » : il démontrera comment l'intérêt égoïste peut sans le vouloir servir le bien commun. Le particulier travaille pour le général. Cette conception smithienne va créer un bouleversement idéologique considérable : désormais collectif et individuel sont liés. Les motivations personnelles se voient légitimées, puisque sans le vouloir, elles conduisent à renforcer la collectivité. Ainsi, l'expression de ma liberté personnelle n'entrave pas l'expression de la liberté collective, mais s'y agrège parfaitement.

    Smith réussira là où Rousseau et Locke ont échoué : il parviendra à résoudre la contradiction entre l'individuel et le collectif, par la découverte de « l'autorégulation naturelle du marché », sorte de deus in machina qui ordonne l'ordre des choses.

    Non seulement Smith résout le problème, mais il le résout sans intervention extérieure : pas d'appel à une quelconque transcendance. C'est le système des interactions humaines qui s'autorégule lui-même de l'intérieur. Un ordre des choses immanent qui réconcilie l'exercice de la liberté individuelle avec l'exigence morale du bien commun : voilà sans doute la doctrine maîtresse d'un XVIII siècle « éclairé. »

    <o:p> </o:p>

    Si l'on reprend la question rousseauiste de l'individu qui agit par et pour lui-même, on voit bien désormais qu'elle se résout sans difficulté. Agissant pour lui-même, l'individu fait sans le vouloir le bien. Voulant faire le « vice », il fait le vertueux. Ainsi est résolue l'ambiguïté rousseauiste qui faisait dire à ce dernier que « la volonté particulière attachée en chacun à ses intérêts particuliers est une volonté pécheresse, qui doit céder devant la volonté générale. »

    <o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p>► Une égalité différentielle
    <o:p> </o:p>

    L'exercice de la liberté pour Rousseau, comme chez Locke, passe invariablement par la capacité à raisonner. C'est de la raison, dont la loi est l'expression que l'homme tire sa liberté. Ainsi la loi en égalisant les conditions entre les hommes, leur fournit le socle commun de leur émancipation, avec l'accession à la propriété (ce qui posera d'ailleurs la question de l'accès à la citoyenneté pleine et entière pour les non-propriétaires au XIX). Le degré de liberté d'un individu se mesure à son degré de raison nous disent ces auteurs. On serait tenté de faire le parallèle avec une société toute entière : l'idéologie évolutionniste qui a légitimé le colonialisme reposait sur la même idée, à savoir celle de la mesure de la grandeur d'un peuple à son degré de raison.

    <o:p> </o:p>

    Ainsi, la raison gouverne aux sociétés libres : c'est donc de sa capacité à être libre, donc à faire preuve de raison qu'un individu sera jugé. Si la loi égalise les conditions, elle n'opère pas pour autant au même degré de rationalité dans l'esprit des hommes. Une distinction est donc faite entre ceux-ci selon leur capacité à raisonner. La société d'égaux tant vantée par Rousseau ne l'est de fait pas tant que cela. « Nous sommes nés libres nous dit Locke, en tant que nous sommes nés rationnels. »

    Certes, l'égalité formelle est là : tous les hommes naissent libres et égaux devant la loi. Mais après ? Comment décider des gouvernants, des représentants du peuple ? Rousseau le dit sans fioriture : les gens éclairés sont au gouvernement du peuple, tandis que la « populace » est méprisée.  Tout le monde n'est donc pas également libre : si la raison fonde la légitimité des dominants, elle reconnaît la dépendance des dominés, de la « populace ».

    Ainsi, la liberté n'est pas pour tous, certains sont moins libres que d'autres, au titre qu'ils sot moins égaux que d'autres, parce que moins éclairés que les autres. Orwell l'a très bien formulé à sa façon, dans un de ces romans où les bêtes se substituant aux hommes, un principe premier est défini selon lequel « tous les animaux sont égaux entre eux », principe auquel il sera ajouté quelques mois plus tard, « mais certains plus que d'autres » qui laissent présager de futures inégalités[4].

    Chez les théoriciens du contrat social que sont Locke comme Rousseau, on retrouve cette distinction opératoire entre les hommes. S'ils commencent par déclarer leur égalité de fait, ils reconnaissent leur différence de raison, et par conséquent leur inégalité sociale. Ils réinstaurent alors un ordre hiérarchique à l'endroit même où ils souhaitaient le supprimer. Aux privilèges du sang succèdent les privilèges de l'esprit. La différence, néanmoins essentielle, qui demeure, est que si la première est décidée de facto, la seconde résulte d'un apprentissage. Le sang s'hérite, l'esprit s'acquiert. L'école apparaît alors comme le plus sûr instrument d'égalité et de liberté entre les hommes. Condorcet prononcera un discours en 1791 prônant les vertus de l'enseignement et sa volonté de le rendre obligatoire pour tous. Il faudra attendre près d'un siècle pour que la chose prenne effet.

    <o:p> </o:p>

    Ainsi, cet extrait de Locke : « Si quelqu'un n'atteint pas un degré de raison suffisant pour pouvoir être supposé capable de connaître la loi, et de vivre dans ses règles, il n'est jamais capable d'être un homme libre, il n'est jamais laissé sans lien à la disposition de sa propre volonté mais est maintenu sous l'enseignement et le gouvernement d'autres tout le temps où son propre entendement est incapable d'en avoir la charge. »

     C'est ainsi que le statut de citoyen ne s'appliquait pas aux aliénés, puisque ces derniers, ne pouvant exercer un contrôle suffisant sur leur propre esprit, se retrouvaient alors être tout à fait légitimement sous la tutelle d'un autre.

    <o:p> </o:p>

    Ainsi, seuls les hommes éclairés pouvaient avoir accès à la pleine citoyenneté et être au gouvernement (mais à la condition de servir les intérêts du peuple toujours, pas les leurs bien entendu). L'opposition éclairé/ignorant que font les Lumières et la philosophie politique ne fait en définitive que remplacer l'opposition ancienne entre noblesse et roturier,  aristocratie et plèbe. Au sang de l'Ancien régime succède la raison de l'époque moderne. Nous soulignions précédemment qu'à la différence du rang par le sang, le rang par la raison n'était pas décidé par avance, mais résultait d'un apprentissage qui pouvait permettre à chacun de devenir éclairé. Il reste néanmoins à souligner que pour l'époque, et pour Rousseau le premier, la « populace », comme il l'appelait et envers laquelle il n'avait que mépris et dédain, ne disposait pas des moyens nécessaires pour s'instruire, larvés qu'ils étaient dans la satisfaction médiocre de leur servitude. Ainsi ceux-là même ne méritaient pas d'être libres. (P. d'Iribarne montre combien cette opprobre à l'encontre des « serfs » qui refusent de se libérer se retrouve dans l'ensemble des condamnations contre les inégalités[5]. On retrouvera ce même raisonnement chez Marx envers les ouvriers qui, s'ils refusent la lutte et acceptent leur servitude, sont considérés comme des parias, individus méprisables qui ne méritent rien, ou encore chez S. de Beauvoir qui n'aura pas de mots assez durs à l'encontre de la femme bourgeoise, qui, enfermée dans son confort protecteur, refuse de lutter contre sa propre servitude.)

    En outre, chez Rousseau, le degré de raison de l'individu relève en partie d'un don de la nature. Ainsi ce que le sang devait défaire, la nature le refait : en abolissant les privilèges de l'aristocratie, on en élève une nouvelle, fondée en partie sur la nature. D'une hiérarchie à l'autre, au final, les différences entre les hommes relèvent encore de différences de nature.

    A l'élitisme héréditaire supplée un élitisme républicain intellectuel[6].

    <o:p> </o:p>

    Les hommes qui refuseraient de se ranger à l'avis général se verraient alors légitimement poursuivis et persécutés. Hors de la communauté des hommes (refusant l'avis général), ils n'auraient donc plus à être traités comme tels nous dit Rousseau. Ainsi en est-il du petit peuple qui demeurant stupide et asservi devient coupable de sa propre servitude : pas d'excuse possible pour lui. La victime devient coupable dans ce schéma de pensée. (on retrouve le même aujourd'hui avec le chômeur, le faible et le démuni qui, s'ils attirent la compassion, attisent aussi le mépris souvent, tant nous les considérons comme des asservis « volontaires » qui refusent de se battre contre leurs conditions. Et comme silence vaut accord, on considère que refus de se battre vaut acceptation)

    <o:p> </o:p>Vous serez tous des rois, mais certains plus que d'autres...
    <o:p> </o:p>

    Pour terminer, ce que l'on peut retenir à travers la lecture critique que fait d'Iribarne des textes fondamentaux des auteurs de l'égalité entre les hommes, c'est que derrière l'aspiration légitime à l'égalité revendiquée devant la loi, il demeure des inégalités prégnantes. Si les hommes se rassemblent et se ressemblent aux yeux de la loi et du droit, ils se différencient très rapidement autour de leur capacité à être libre. Mettant en avant ce qui rassemble les hommes, Locke, Rousseau et leurs contemporains recréent de l'inégalité dès qu'ils soulignent ce qui les différencient.

    « Assurément, la tutelle de ceux qui sont riches  en « lumières » sont invités à exercer sur ceux qui en manquent est déclarée par nos textes fondateurs compatibles avec la liberté, ou même porteuse de liberté. Mais c'est au prix d'un détour à la lecture traditionnelle des rapports sociaux, qui est celle même que leur appel à l'émancipation conduit à dénoncer.[7] »

    <o:p> </o:p>

    L'homme est donc à lui-même son propre maître aux conditions suivantes seulement :

    -        qu'il soit doué de raison (gouvernement des « éclairés »)

    -        qu'il aille dans le sens de la volonté générale (obéissance aux lois)

    -        qu'il se défasse de sa volonté particulière (signe de son asservissement)

    En dehors de sa capacité à être autonome, à se gouverner soi-même, l'homme ne mérite pas le statut de citoyen : seul l'individu pleinement libre et autonome, seul celui dont la volonté n'est pas assujettie, n'est pas corrompue est digne d'être citoyen. Tout autre situation laisse l'homme aux portes de l'humanité.

    On pourrait dire pour résumer que Locke et Rousseau, en condamnant l'inégalité de la société aristocratique, instaurent les bases d'une démocratie de type « luxocratique » (pardon pour le néologisme) où de nouvelles inégalités apparaissent, assise sur une hiérarchie de la raison. Au Monarque dominant succède à partir du XVIII la Raison maîtresse. Et la citoyenneté est réservée à ceux qu en sont dignes, les gens lettrés, les « éclairés », tandis que la masse informelle des petits paysans analphabètes bénéficie d'une citoyenneté au rabais, politique (droit de vote), sans être sociale.

    Deux cents ans plus tard, le statut des pauvres, des individus voués aux tâches les plus ingrates reste toujours plus ou moins déconsidéré. Et que dire de ceux qui ne bénéficient même pas des moyens de subsistance nécessaires à leur survie, qui vivent en partie de l'assistance. Les mots ne sont pas assez durs pour condamner ces poches de pauvreté d'un côté, mais ils sont tout aussi durs pour déconsidérer ces hommes et ces femmes, dont la citoyenneté est elle aussi une citoyenneté de seconde zone.



    [1] Philippe d'Iribarne, Vous serez tous des maîtres, La couleur des idées, Seuil, 1996.

    [2] Plus particulièrement sur son ouvrage Second Traité de Gouvernement.

    [3] Référence au célèbre ouvrage de Sieyès intitulé Qu'est ce que le tiers-Etat ?

    [4] Georges Orwell, La ferme des animaux, Folio, Gallimard.

    [5] Que ce soit les ouvriers chez Marx, le Tiers-Etat chez Sieyès, les femmes chez Beauvoir, etc. –

    [6] On retrouve un peu cela aujourd'hui avec le gouvernement des élites, des « experts », comme la Commission Attali en apporte la preuve, en affirmant que ses décisions doivent s'appliquer., en dehors de tout débat parlementaires, en dehors de la représentation politique du peuple.

    [7] P. d'Iribarne, Ibid, p. 41.



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  • Après deux semaines d'absence, je publie aujourd'hui un court billet qui revient sur les conséquences sur le plan sociologique des transformations de la sphère économique depuis les années 80. J'essaie de montrer rapidement que derrière l'idéal de libération et d'émancipation véhiculée par l'idéologie capitaliste de l'individualisme, les nouvelles formes précarisées d'emplois tendent davantage à désolidariser les individus plutôt qu'à les libérer. Plus exactement, que la liberté nouvellement acquise est un trompe l'oeil qui masque une désaffiliation croissante des individus entre eux et à la société. Certes, la sphère économique n'est pas à elle seule responsable de ces modifications dans les rapports sociaux, mais elle les alimente et les entretient dans une approche dérégulée du monde. A l'individu libéré se substitue un individu délié.

     

     

    Les transformations de la sphère économique, et plus particulièrement des formes et de la nature de l'emploi, vont avoir une influence sur les formes de relations sociales entre les individus et sur les rapports sociaux de travail. Les deux conséquences sociologiques majeures sont l'individualisation croissante des relations sociales et la dislocation du lien au niveau des catégories sociales d'un côté, la fragilisation des carrières et l'absence d'identification professionnelles claires de l'autre. 

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>1.      la dislocation du lien social
    <o:p> </o:p>

    Aujourd'hui, environ 2/3 des employés exercent dans une activité qui les met au contact direct avec le client (banque, assurance, services à la personne, etc.). Les dimensions relationnelle et interactionnelle sont devenues essentielles. Le travail est donc dans ces conditions individualisé, personnalisé entre l'employé et son client/l'employeur.  Comme le souligne E. Maurin, « il est plus difficile de se mobiliser et de fédérer des salariés que le travail isole et met personnellement en question que des salariés que le travail rassemble et soude dans un meme effort[1] »

    Nous ne sommes plus en présence d'une forme de solidarité organique comme Durkheim l'avait mise à jour dans l'entreprise industrielle au début du XX siècle. Les relations sont beaucoup plus directes, informelles, « affectives » entre l'employé et son employeur/client.  Le risque est que la conscience d'appartenir à un groupe social plus important s'effrite (l'entreprise s'évanouit, la CSP aussi) et que l'individu se désolidarise de son groupe d'appartenance.

    Le lien social s'effrite avec l'individualisation des relations d'emplois. Mais un autre aspect, découlant de celui-ci porte un risque de fracture du lien social : c'est celui de la perte de repères, du manque de sécurité professionnelle.

    <o:p> </o:p>2.      Stress et responsabilisation
    <o:p> </o:p>

    « Les salariés les plus modestes sont plongés dans des contextes de plus en plus informels, plus proches du client et de la demande finale. Ils ont certes gagné en autonomie, mais ils sont aussi sollicités de façon beaucoup plus personnelle[2] ». Etant sollicités davantage, ils sont davantage soumis au stress, à l'angoisse, aux pressions. Ce faisant, s'ils ont des difficultés à remplir leurs objectifs, à contenter le client, à satisfaire l'employeur, ils prendront sur eux et considéreront que leurs difficultés vient d'eux-mêmes et de leur incapacité, de leur manque de performance personnelle.  L'individu se retrouve désormais seul face à ses succès mais aussi face à ses échecs, qu'il s'approprie. En gagnant en autonomie, il gagne en liberté, mais il gagne aussi en responsabilisation individuelle. Tout échec est avant tout son échec, il n'y a plus de relais, de hiérarchie assurant cette responsabilité. Cela peut être difficile à assumer, surtout que les échecs ne sont pas toujours directement imputable à la personne, mais à l'insuffisance de liens, au manque de contrôle des supérieurs, aux cadences demandées qui sont intenables, etc[3]. Tous ces éléments peuvent conduire à la fatigue d'être soi[4] .

    <o:p> </o:p>

    Dans la sphère économique à l'heure actuelle il y a une injonction à être, une injonction à s'autonomiser, à se responsabiliser. Celui qui n'y arrive pas est dévalué, laissé sur la touche. Cependant, l'autonomie ne se donne pas, elle s'acquiert et certains ont plus de facilité que d'autres à s'autonomiser parce qu'ils ont davantage de ressources individuelles pour y parvenir[5].

    <o:p> </o:p>3.      Nouvelles inégalités sociales
    <o:p> </o:p>

    On est dans une situation professionnelle où il est désormais de plus en plus difficile de définir sa catégorie d'appartenance, ainsi que celle des autres. Ce manque de repères est lié à deux transformations importantes :

    -         l'individualisation des parcours et des relations d'emplois d'un côté

    -         l'apparition de nouvelles formes d'inégalités sociales de l'autre

    C'est ce deuxième point qui va désormais nous intéresser.

    <o:p> </o:p>

    Les chiffres sont têtus, car les inégalités sociales persistent et se maintiennent dans le temps. Les chiffres de la mobilité sociale n'ont pas évolué (ou très peu) depuis le début des années 80. On assiste à une pérennisation des inégalités sociales anciennes, de type structurelle. Cependant nous dit l'auteur, « ces inégalités ne s'ancrent plus dans la division sociale du travail ; elles ont perdu leur capacité à forger des identités de classes. » E. Maurin signifie par là que si la mobilisation de classe s'est essoufflée depuis les années 70, ce n'est pas parce que les inégalités ont disparu objectivement, mais parce que la conscience de classe s'est effritée et l'appartenance de classe n'est plus ressentie sur le plan subjectif.

    Pourquoi s'est-elle effritée ? C'est justement en raison de la transformation des relations d'emplois, qui individualise le travail et qui personnalise les travailleurs, diminuant par là même le regroupement de salariés, le sentiment d'unité salariale.

    Mais c'est aussi parce que de nouvelles formes d'inégalités ont vu le jour, qui ne se sont pas substituées aux anciennes mais qui ont eu pour conséquence de démobiliser l'action collective pour lutter contre les inégalités sociales structurelles (ou de classe). Ces nouvelles formes d'inégalités ont été analysées par Fitoussi et Rosanvallon dans un ouvrage éclairant[6], où ils montrent comment ce qu'ils nomment les inégalités dynamiques se sont ajoutées et superposées aux inégalités anciennes qui étaient plus identitaires et plus structurantes.

    Les inégalités dynamiques correspondent aux inégalités qui touchent des individus appartenant aux mêmes catégories socioprofessionnelles mais dont les statuts particuliers diffèrent, ce qui a pour conséquence de déliter le sentiment d'appartenance à tel ou tel groupe social et par suite les identités professionnelles, et rendre plus difficile alors les mobilisations collectives. Pour exemple, être cadre à temps plein et en CDI dans une entreprise diffère du statut de cadre à temps partiel, qui doit compléter son salaire par un autre emploi, ou de celui de cadre au chômage. Ils appartiennent objectivement aux mêmes catégories sociales, mais individuellement, ils ne se sentent pas liés, ne partageant pas les mêmes styles de vie notamment.
    <o:p> </o:p>Conclusion
    <o:p> </o:p>Fragilisés, individualisés, les salariés se sentent moins liés les uns aux autres. Les nouvelles formes d'inégalités intra-catégorielles renforcent le sentiment d'éloignement professionnel et social. tout cela a pour conséquence de fragiliser les identités professionnelles, de défaire les repères structurants qu'étaient les classes sociales, l'appartenance à un groupe professionnel, à une corporation, qui permettait de socialiser l'individu, de se définir une identité statutaire claire et à peu près stable. Aujourd'hui, ces fragilisations économiques conduisent à une fragilisation sociologique et psychologique des individus.
    Moins liés, moins structurés en termes d'identité collective, les individus se définissent d'abord par et pour eux-mêmes, dans leurs actions, leur trajectoire propre, sans avoir de repères qui puissent les orienter. Identité narrative, où l'individu « se raconte » avant de se lier, identité du « je » où le « nous » semble perdre de sa consistance. Durkheim aurait parlé d'un risque d'anomie, constatant le manque d'interdépendance entre les individus.
    Si aujourd'hui l'individu contemporain est plus libéré dans son travail, dans ses rapports familiaux également, il est aussi moins lié. L'individu hypermoderne est certes un individu libéré, mais plus encore peut-être un individu délié.
    <o:p> </o:p>


    [1] E. Maurin, op. cit, p. 9.

    [2] Ibid, p. 43.

    [3] Le trader qui a fait perdre 5 milliards à la Société générale a certes agi seul, mais si sa responsabilité est bien engagée, elle ne doit pas être seule, il y a des instances de contrôle qui doivent surveiller les transactions, il a un chef de service qui contrôle ses traders, il y a également un siège central qui sollicite ses employés à faire toujours plus de bénéfices, etc. La responsabilité individuelle ne doit pas masquer les responsabilités collectives qu'il y a derrière. Plus parlant encore est l'exemple du chauffeur-routier qui ayant perdu son permis pour excès de vitesse répétés, se voit licencié de son emploi. Certes, il est en partie responsable de ces excès, mais son patron exige de lui qu'il fournisse ses clients le plus vite possible, tant et si bien qu'il devient impossible pour le chauffeur de respecter les limitations s'il veut satisfaire ses objectifs. La responsabilité en incombe tout autant au patron, mais c'est l'employé seul qui en fait les frais.

    [4] En référence à l'ouvrage de A. Ehrenberg, La fatigue d'être soi, O. Jacob, Paris.

    [5] Le travail social repose en grande partie aujourd'hui sur une éthique de la responsabilisation et d'autonomisation des précaires : on les accompagne, on ne les aide plus. C'est à eux de faire pour eux, le travailleur social n'est qu'un guide, qu'un accompagnateur : si cette éthique semble mieux correspondre à l'exigence de responsabilité, il est néanmoins important de constater que certains publics sont incapables de se responsabiliser, tant la déstructuration identitaire et sociale est profonde.

    [6] J. Fitoussi et P. Rosanvallon, Le nouvel âge des inégalités, Paris, Seuil, 1998 (je crois).



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  • Andre Gorz, décédé il y a quelques mois, était un philosophe français, intellectuel résolument engagé, socialiste, fondateur du mouvement d'écologie politique, qui s'est efforcé de décrire dans ses nombreux ouvrages le mode de fonctionnement du système capitaliste et ses évolutions contemporaines qui tendent à circonscrire l'ensemble des rapports sociaux et des institutions sociales (Ecole, Etat, Entreprise, mais aussi Famille, loisirs, etc.) en rapports de type économistes, c'est-à-dire axés sur la recherche de la maximisation de  l'intérêt particulier et sur la rentabilité.

    La thèse centrale qu'il développe dans son œuvre Capitalisme, Socialisme, Ecologie[1], recueils de textes et de conférences sur la fin du socialisme bureaucratique, centralisé, autocratique et répressif, est celle des mutations nécessaires pour le passage vers une autre forme de socialisme qu'il appelle de ses voeux et qu'il essaie de formuler autour de la question du respect de l'autonomie individuelle. Un nouveau socialisme est possible aujourd'hui, non pas un socialisme traditionnel considéré comme collectivisation des moyens de production et des forces productives, et planification des besoins et des désirs collectifs, mais un socialisme libertaire, réformateur, qui réfute toute idée d'unification des sphères sociales (industrie, culture, presse, loisirs, etc.) mais laisse à chacune d'elle sa propre sphère d'activités autonomes, et qui par conséquent reconnaît le droit d'exister au capital, et donc à la propriété privée des moyens de production.  Il définit les contours d'un nouveau type de socialisme, qui n'ait ni les moyens de contrôler ni ceux de définir l'activité productive (il démontre par ailleurs très bien les défauts d'un tel système et son penchant autocratique et répressif) mais qui soit une construction politique et sociale d'orientation, de guide pour l'activité économique. Ce que défend l'auteur en réalité, c'est une inversion radicale du modèle économique capitaliste. Critique vis-à-vis du capitalisme, il reconnaît néanmoins que celui-ci a apporté un mieux-être même s'il ne doit pas constituer une fin en soi.

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>De la production des besoins...
    <o:p> </o:p>

    En effet, aujourd'hui, le capitalisme fonctionne selon un schéma d'apparence libertaire et émancipateur mais qui est en réalité profondément aliénant et uniformisant. Fonctionnant selon un mécanisme de marché, le capitalisme a besoin pour survivre et perdurer (donc grossir) de toujours innover et de renouveler son offre ; en cela il est consubstantiel à l'idée de mouvement, d'instabilité, de mobilité. Mais il ne peut exister sans une création permanente de nouveauté. A ce titre, le système social capitaliste fonctionne comme une machine à produire des besoins afin de pouvoir écouler ses « besoins » produits auprès de consommateurs demandeurs de ces besoins.

    Ainsi, tel qu'il fonctionne, le capitalisme économique crée des besoins et des désirs auxquels souscrivent inconsciemment (pas toujours) les hommes. La satisfaction narcissique n'est alors jamais acquise, car la machine produit en permanence de nouvelles sources de frustration, donc de nouveaux désirs, et par conséquent de nouveaux plaisirs de consommation. A peine un besoin est satisfait qu'un autre est crée, et ainsi de suite.  Ce que Gorz critique fermement c'est cette création négative, cette illimitation factice des besoins mise au service de l'économie. Or, c'est un cercle vicieux, à la manière de Sisyphe contraint à pousser indéfiniment son rocher sur la montagne, et qui, pensant être arrivé au terme de son supplice, doit recommencer encore et encore.

    L'image n'est pas de trop : c'est exactement le même schéma qui gouverne aux sociétés capitalistes : créés de toutes pièces par la sphère de production, les nouveaux produits deviennent de nouveaux besoins, qui doivent être libidinalement satisfaits par la consommation et qui retournent donc dans la chaîne de production qui peut alors en fournir de nouveaux, etc.

    Ainsi, en économie capitaliste, on a en amont la production, en aval la consommation, mais en réalité consommation et production participent de la même stratégie capitaliste globale : la création fictive de besoins par une entreprise délibérée de contrôle des désirs et des émotions, tendant à l'uniformisation des comportements individuels.  Pour le dire plus simplement, si le capitalisme émancipe l'individu de la nécessité, c'est pour mieux l'enchaîner au besoin.
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    Comment en-est on arrivé là s'interroge l'auteur ? Pour lui, la réponse est simple : c'est l'autonomisation progressive de l'économie des autres sphères (politiques, sociales, culturelles, etc.) qui a conduit à cette inflation des besoins. L'autonomie du capital a conduit à différé les besoins : au petit paysan qui assurait sa propre récolte pour sustenter à ses besoins succède au XIX l'ouvrier prolétaire de l'industrie qui produit afin de pouvoir acheter sur le marché des biens et des services ce dont il a besoin pour vivre. Les besoins et leurs satisfactions sont déconnectés, ils sont déliés avec l'autonomisation du capital. C'est lui qui fournit (produit) les biens de l'extérieur. L'autoproduction assurait la satisfaction des besoins essentiels. Une fois cette production des besoins émancipés des individus, le système capitaliste a alors pu mettre en place de nouveaux besoins. Une fois autonomisée de la sphère sociale, la création des besoins a pu dépasser celle des seuls besoins réellement ressentis pour ouvrir tout un espace de besoins fictifs, superflus. Mais c'est justement aujourd'hui ce superflu qui fait l'essentiel. Quel intérêt « vital » ai-je à posséder un 16/9 ? J'ai beau le savoir, la possession d'un 16/9 m'emplit de satisfaction. Mais à peine ai-je le temps de contempler mon produit (de sustenter mon besoin, de complaire à ma satisfaction narcissique) qu'un autre besoin/désir m'appelle, etc.

    Ainsi, il constate que le capitalisme privilégie un développement selon un modèle de rationalisation unique de type instrumental qui s'étend bien au-delà de la seule sphère économique et de l'Etat mais qui se diffuse également au cœur de la famille et de nos vies privées (toutes nos actions, nos comportements doivent servir un intérêt particulier, doivent remplir une utilité fonctionnelle, donc être « rentable »), au détriment dit-il de la rationalité « morale-pratique » et « esthétique-pratique » (l'agir par conviction, par principes, par sensibilité).

    <o:p> </o:p>...aux besoins à produire.
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    André Gorz milite pour un socialisme nouveau, véritablement émancipateur (donc bien loin du socialisme réel tel qu'il s'est historiquement constitué), dans lequel les besoins et les désirs seraient premiers, et où l'économie serait au service de leurs satisfactions. On assiste à  inversion du processus productif, où ce n'est plus l'économie qui fixe et oriente les désirs, mais où ce sont les désirs et les besoins individuels qui fondent et orientent l'activité productive. Pour lui, « il s'agit de rattacher les finalités de l'économie à la libre expression publique des besoins ressentis, au lieu de créer des besoin à la seule fin de permettre au capital de s'accroître et au commerce de se développer[2]. »  Sur cette approche consumériste de la sphère de production, on peut se référer aux célèbres et magistraux ouvrages de Jean Baudrillard sur Le système des objets et La société de consommation.

    Dans le nouveau socialisme que Gorz appelle de ses voeux, l'homme gagne en liberté,  son autonomisation n'est plus alors instrumentalisée dans le sens d'un utilitarisme économique, elle est davantage axée sur des considérations morales, humanistes, loin de tout utilitarisme institué.

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    Il pose en définitive la question de savoir si un nouveau monde est possible, un monde où l'action sociale engagée ne le serait pas dans un souci exclusif de rentabilité marchande, mais dans le sens d'une « qualité de vie optimale ». Cela nécessite bien évidemment une transformation en profondeur de nos modes de production et des rapports sociaux. A cette question, Gorz essaie d'y répondre en trouvant paradoxalement dans le système capitaliste lui-même les sources éventuelles de cette transformation sociétale et économique.

     On le voit, Gorz ne milite pas pour la disparition du capital, mais pour celle du capitalisme, véritable dogme, pierre angulaire de notre système idéologico-politico-économico-social. Oui à la conservation de la sphère économique, autonome, distincte, séparée de la sphère étatique, mais tout en orientant celle-ci vers une finalité anti-utilitariste et anti-productiviste. Mais une finalité humaniste, tournée vers l'épanouissement véritable de l'homme.

    <o:p> </o:p>Les bases du socialisme nouveau
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    Pour cela, il expose rapidement quelques uns des points essentiels qui permettraient de fonder les bases de ce socialisme du XXIème siècle :

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    1.      subordination de la rationalité économique à la rationalité écologique et sociale, car la maximisation du profit personnel et le renouvellement incessant de produits/besoins/désirs sont incompatibles avec les formes nouvelles du socialisme libérateur.

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    2. Nécessité d'autolimitation des besoins avec le développement de l'auto-production et du « temps choisi » (contrairement au temps libre qui est en réalité qu'un temps de cerveau disponible pour Coca-Cola, donc pour l'entreprise de subversion des besoins)

    Cette autolimitation des besoins est considérée par l'auteur comme la reconquête de l'autonomie par et pour l'individu, qui nécessite par ailleurs une diminution progressive du temps de travail et une augmentation parallèle des activités autodéterminées, qu'elles soient collectives, communautaires, ou individuelles. Il prône notamment la mise en place d'unités de production sous forme de coopératives.

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    3.  Le socialisme qu'il défend n'est pas seulement un socialisme de « captivité » de l'économie aux besoins et aux valeurs de la société, mais il est aussi la création d'une sphère de « mise en commun communautaire, de coopération volontaire auto-organisée, d'activités auto-déterminées de plus en plus étendues » rendus possible avec la baisse du temps de travail. L'engagement associatif, militant, auprès d'ONG, de mouvements écolo, etc. reposent sur cet aspect : engagement libre et volontaire, auto-organisé, collectifs, etc.

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    4. Enfin, pour rendre tout cela possible, il faut arrêter de fixer le revenu sur le seul temps de travail productif, et même d'une manière plus large sur la durée de travail quel qu'il soit (productif, domestique, intellectuel, etc.)  L'auteur est pour l'instauration d'un revenu social garanti qui puisse permettre à l'individu de s'engager dans des actions associatives, de ne plus être stigmatisés par l'absence d'emplois, que le chômage ne soit plus synonyme d'identité en creux, etc. le revenu serait lié au travail productif certes, mais également aux activités annexes. A ce titre, F. Bayrou avait il me semble en son temps, proposé un système de rémunération pour l'engagement associatif notamment afin d'éviter la stigmatisation des publics précaires et des chômeurs entre autres. Et bien montrer que l'utilité sociale d'un individu ne se limite pas à son utilité économique et productive, mais prend en compte aussi son activité morale.

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    [1] André Gorz, Capitalisme, Socialisme, Ecologie, Désorientations/Orientations, Paris, Galilée, débats, 2001.

    [2] A. Gorz, p.31.



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